Préoccupations automobiles pour les Albertain(e)s

Rassurez-vous, Bernadette va très bien. J’avais juste besoin d’une photo pour illustrer le présent message et celle-ci, prise à Saskatchewan River Crossing lors du dernier périple vers Vancouver semblait bien faire l’affaire. En fait, ce n’est pas seulement moi en tant qu’automobiliste qui suis concerné par les nouvelles qui nous parviennent ces derniers jours; toute la population albertaine qui tient occasionnellement un volant (il paraît qu’il y a environ trois millions de véhicules immatriculés dans la province) sera touchée.

L’automne dernier, les journaux et les autres médias d’information nous invitaient à aller visiter le site de «Service Alberta», sur lequel on trouve un peu tous les services gouvernementaux offerts aux citoyens, pour donner notre avis à propos de changements proposés à la plaque d’immatriculation utilisée sur les véhicules dans la province. Une visite ici vous permettra de voir l’évolution des plaques utilisées en Alberta. La plaque actuelle compte trois lettres suivies de trois chiffres (sauf quelques exceptions, notamment les véhicules commerciaux et les «vanity plates», que l’on pourrait traduire par «plaques personnalisées», qui sont offertes à ceux qui veulent débourser davantage pour immatriculer leur véhicule). Les lettres et chiffres sont imprimés en rouge carmin sur fond blanc. En haut de la plaque est écrit, dans une typographie datant des années 1980, le logotype officiel du gouvernement provincial suivi d’une représentation graphique du symbole floral de la province, la rose sauvage. En bas de la plaque, on retrouve un slogan (qui n’est pas la devise héraldique officielle de la province): Wild Rose Country (le pays de la rose sauvage).

Pourquoi devient-il nécessaire de changer nos plaques? C’est en fait un phénomène de mode, ce que personne au gouvernement ne veut admettre. Le site du sondage l’affirmait indirectement en disant que «le design actuel date de 25 ans». Bon… Celui du Québec date de 1979 et celui de l’Ontario de je ne sais trop quand, mais ça ne semble pas poser de problème là-bas. Enfin… L’autre argument apporté, qui n’en est pas un, est que «avec la croissance du parc automobile dans la province suite à l’immigration massive dans la province, il n’y aura plus de numéros disponibles». Comme je le disais dans ma propre réponse au sondage, le Québec et l’Ontario utilisent un système de numérotation semblable et ce qui a été fait dans les deux cas fut d’abord d’inverser la séquence lettres-chiffres pour adopter une séquence chiffres-lettres et en Ontario, puisque les deux séquences ont été épuisées, on a adopté un système avec quatre lettres suivies de trois chiffres. L’Ontario, en passant, a probablement un parc automobile trois à quatre fois plus considérable que celui de l’Alberta, puisque sa population est de 12 millions avec un taux de croissance de 6,6% en cinq ans (recensement 2006) alors que la population de l’Alberta, qui croît plus rapidement (10,6%), n’était que le quart de celle de l’Ontario en 1996, soit 3,3 millions (source). La raison ne peut donc être que «l’Alberta va manquer de numéros», c’est plutôt que l’on veut imiter plusieurs autres juridictions qui ont rendu leurs plaques d’immatriculation plus décoratives pour servir à la promotion touristique. Je serais intéressé à savoir jusqu’à quel point les gens voyagent vraiment en auto hors de leur propre province ou état, mais je pense que ça fait partie de cette mode du «branding» que j’ai déjà discuté. Mais peut-être ne suis-je qu’un vieux ronchon de trouver que tout ce bataclan représente un gaspillage de ressources qui seraient mieux utilisées ailleurs.

Aujourd’hui, on nous annonçait que le gouvernement allait, cet automne, prendre une décision quant à la nouvelle plaque. Elle sera donc changée et l’on veut que la plaque soit associée au propriétaire du véhicule (donc qu’elle soit transférable d’un véhicule à l’autre lors du remplacement de celui-ci). Ce n’est pas mal en soi. De même, l’idée de manufacturer les nouvelles plaques dans un matériau réfléchissant en augmentera grandement la lisibilité (pourvu que le décor arrière ne nuise pas à la lecture des numéros comme c’est le cas à plusieurs endroits, notamment en Colombie Britannique et au Manitoba). Heureusement, même si une décision finale n’a pas encore été prise quant à la conception graphique de la nouvelle plaque (cela sera décidé à la prochaine réunion du caucus à l’automne), on a d’ores et déjà rejeté l’idée, promue entre autres par certains corps policiers, de nous infliger une plaque à l’avant du véhicule. Ouf!

La plus grande controverse que risque de provoquer ce changement de plaque concerne le slogan qui y est inscrit. Sur le site du sondage, si ma mémoire est bonne, deux slogans nous étaient proposés, puis on pouvait aussi en suggérer. Il y avait le «Wild Rose Country» actuel et la devise officielle de la province, «Strong and Free», traduction du latin «Fortis et liber», ce qui donne en français, «fort et libre». Je sais bien que ces trois mots font partie de la version anglaise de notre hymne national, mais s’il est choisi (et présentement, 44% des personnes qui ont répondu au sondage préfèrent ce logo, contre 30 et quelque chose pour cent qui préfèrent la rose sauvage), je vais remettre mon cadre de plaque du concessionnaire, qui le cachera. Je ne veux rien savoir d’un slogan aussi potentiellement militariste. À la radio, tout à l’heure, l’animateur suggérait, pince-sans-rire, «We’ve got the oil», qui serait approprié, mais qui se ferait aussi couvrir sur ma voiture!

Le gouvernement provincial annonçait par la même occasion la mise en place de nouvelles mesures visant à contrer l’alcool au volant, lesquelles s’appliqueront beaucoup plus tôt que l’arrivée des nouvelles plaques. Les récidivistes et ceux (ou celles, tiens!) dont le taux d’alcoolémie dépassera le double du taux permis se verront obligés d’installer sur leur voiture un système anti-démarrage obligeant le chauffeur à se soumettre à un alcootest avant de conduire. Bon… Je peux imaginer une panoplie de moyens de contourner cette mesure, mais l’idée est bonne. Des mesures semblables existent entre autres au Québec. L’alcool au volant est un problème important dans cette province et toute mesure visant à en réduire l’incidence ne peut qu’améliorer un tant soit peu les choses.

L’autre événement d’intérêt automobile de la journée concerne le taux des assurances. En Alberta, l’immatriculation des véhicules est beaucoup moins chère qu’au Québec, mais c’est surtout parce que, au Québec, l’immatriculation inclut une prime chargée par la Société de l’Assurance Automobile (SAAQ) qui sert entre autres à couvrir les dommages corporels causés par un accident. Ici, toute l’assurance est privée, et donc la prime à payer est déjà plus élevée qu’au Québec parce qu’elle sert à couvrir toutes les responsabilités du conducteur, sans participation gouvernementale au régime. Il y a cependant une prime minimale à payer justement pour couvrir les dommages qu’un conducteur pourrait causer à d’autres personnes dans l’opération de son véhicule.

Le gouvernement albertain, avait imposé en 2004 un quota concernant les montants payables pour certaines catégories de blessures, les soft-tissue injuries, soit les blessures musculaires ou nerveuses, ceci n’incluant donc pas les fractures. Ce plafond de 4 000$ d’indemnité pour les blessures de ce type a été déclaré inconstitutionnel en février dernier, entraînant une réévaluation de tout le système d’assurance-automobile dans la province. Hier, on entendait parler d’augmentations possibles allant jusqu’à 37% de la portion obligatoire des assurances. Nous devrions être fixés quant à ce changement en novembre prochain.

Dans cette province, à moins de vivre à Calgary ou Edmonton et de ne pas trop en sortir, posséder une automobile est presque une obligation.