Cette dame de 78 ans qui fait la une de La Presse aujourd’hui? Ma tante Jacqueline (Mère Hélène en religion), abbesse de l’Abbaye Notre-Dame-de-la-Paix de Joliette. Pourquoi elle fait la une du quotidien montréalais? Eh bien… son monastère et le couvent voisin des Sœurs des Saints-Cœurs de Jésus et de Marie, ont joint leurs efforts, leurs propriétés foncières en bordure de la rivière l’Assomption et, je n’en doute pas, leurs prières, pour que se réalise un projet innovateur d’hébergement intégré de personnes âgées à revenu modeste en plein cœur de ma ville natale. Le projet, Pax habitat, a commencé il y a quelques années et a suscité ma curiosité et mon intérêt dès le début. J’en suis avidement la construction et le développement (ce qui se fait plus facilement sur la page fesse-de-bouc du projet que sur le site officiel). À l’heure où la plupart des communautés religieuses et paroisses vendent leurs biens fonciers pour tenter de survivre à la décrue de leurs membres actifs (et aux coûts élevés des soins de leurs membres âgés), certains le font surtout pour remplacer les bâtiments par des copropriétés, souvent de luxe, alors que ces deux communautés religieuses ont plutôt choisi d’innover dans la lignée de leurs charismes respectifs… en plus de cohabiter avec les résidents laïcs.
Les terrains dont on parle, ce sont ceux-ci, logés dans un méandre (inondé presque chaque printemps au moins en partie) qui constituait la ferme des Bénédictines. En passant, ma tante a grandi juste de l’autre côté de la rivière, en bordure de l’eau et en surplomb de ces terres). Le bâtiment le plus bas entre la rue de la Visitation (l’axe nord-sud et la rue principale de Joliette) est la maison Amélie-Fristel, couvent des Sœurs des Saints-Cœurs de Jésus et de Marie. Autrefois, c’était une école primaire pour filles — pensionnat et externat. Ma mère y a étudié. Depuis les années 1970, c’était une maison d’hébergement pour les religieuses. Juste au nord, le bâtiment formant un H trapu, c’est l’Abbaye Notre-Dame-de-la-Paix et ses dépendances (dont autrefois une chèvrerie), auquel les terres de la péninsule étaient jusqu’à récemment attachées et derrière lequel a été construit le bâtiment de Pax Habitat. Le petit centre commercial juste au nord a autrefois été propriété des Clercs de Saint-Viateur, qui y tenaient une maison de retraites fermées pour hommes, mais qui a depuis longtemps été rasée et remplacée par des édifices commerciaux. La photo de Google Maps a été prise avant la translation du cimetière abbatial en mai 2019 et on peut voir le petit terrain de mini-golf des Moniales dont peuvent dorénavant bénéficier les résident·es de Pax Habitat.
Ces deux photos tirées du site de l’entrepreneur général en construction responsable du projet, Christian Arbour, prises de l’avant et de l’arrière du nouveau bâtiment donnent une idée de l’ampleur du projet, qui comprend des résidences pour les religieuses des deux communautés (les Moniales habitent dorénavant à l’extrême sud du bâtiment, où la brique est beige plutôt que grise), un centre de la petite-enfance (une garderie) et un centre de soins spécialisés. Le bâtiment suit la bordure de la côte (hors de la zone inondable).
Il s’agit vraiment là d’un superbe projet qui permet de retourner à la collectivité un investissement social séculaire plutôt que de le transformer en espace privé. Bel exemple de collaboration et d’incarnation d’une vision ouverte et socialement engagée du christianisme. Félicitations! Ad multos annos! Je suis aussi curieux de savoir ce qui adviendra des bâtiments conventuels originaux, qui seront préservés, mais dont l’usage n’est pas encore entièrement déterminé.
*Veuillez noter que la journaliste a fait une petite erreur en confondant le fronton sur lequel est inscrit «PAX», qui se trouve à l’Abbaye et non au couvent Amélie-Fristel. Mais bon… comme elle n’est pas du cru, on peut comprendre qu’elle a pu confondre.